Ciao Dolce Vita !
Cap sur le petit dernier du maître du
thriller à l'italienne, j'ai nommé Donato CARRISI bien sûr ;
dont le nom se propage à une allure folle sous la plume des
critiques littéraires depuis Le Chuchoteur, son chef d’œuvre,
sans conteste.
Allez, je vous concède un petit « spoiler »
pour les plus accros : l'auteur a lâché la bombe à l'occasion
d'un concours sur les réseaux sociaux, très prochainement, nous
aurons le plaisir de le retrouver dans La Fille dans le
Brouillard. Pour l'heure, nous nous intéresserons aujourd'hui à
Maléfico, suite s'il en est du Tribunal des Âmes.
***
Marcus est un pénitencier. Un
prêtre capable de déceler le mal enfoui en nous. Mais il ne peut
pas toujours lui faire barrage. Sandra est enquêtrice photo pour la
police. Elle photographie les scènes de crime et ferme parfois les
yeux. Face à la psychose qui s'empare de Rome, ils vont unir leurs
talents pour traquer un monstre. Ses victimes : des couples. Une
balle dans la nuque pour lui. Une longue séance de torture pour
elle.
***
Un Architecte de Génie
Ce petit pitch étant fait, autant vous
dire que la réalité va bien au-delà de la forme un peu simpliste
du résumé. Comme à l'ordinaire avec CARRISI, il n'est pas question
ici d'un énième polar qui, aussi distrayant puisse-t-il être, ira
vite se noyer dans la marée de romans noirs qui sort chaque année
pour finir par s'échouer sur vos étagères poussiéreuses.
Ce qui rend si spécial l'auteur est ce
sens profond pour la véritable littérature, sa forme, sa richesse
voire parfois sa technicité. Chacune de ses productions, derrière
cette trame policière, renferment de véritables petits joyaux qui
éveilleront les lecteurs du dimanche et rallieront les plus avertis
et amoureux du classicisme à ce genre, plus contemporain.
Sur les Pas de l'Enfant de Sel
Au milieu de nulle part, à une heure
interdite, de jeunes tourtereaux aux cœurs battants et aux sens
émoustillés, s'apprêtent à se donner en amour. Enveloppés par
les bras réconfortants d'immenses conifères, ils sont à mille
lieux de Le distinguer, tapi dans l'ombre.
Depuis quelques temps, un maniaque
hante les tréfonds de Rome et agite le Vatican en massacrant tous
les jeunes amoureux qui auront le malheur de croiser son chemin. Plus
que dans l'assouvissement d'instincts sanguinaires, sa perversion se
concentre sur un seul et même dilemme : confronter les amants à
leur lâcheté respective et souiller leur amour naissant en les
poussant à commettre l'innommable. Tué ou être tué, voici le deal
maléfique.
L'agent Sandra Véga, photographe de la
brigade criminelle et spectatrice privilégiée de ses exhibitions
machiavéliques décide de mener l'enquête, bientôt rejointe par
Marcus, un pénitencier solitaire et amnésique, vieille
connaissance au passé trouble. Leurs investigations communes et les
détours empruntés vont bientôt les mener sur les traces de
l'Enfant de Sel, tueur énigmatique et évanescent, bénéficiant, à
son insu, d'une protection inexpliquée.
***
Nul doute que l'on ne saurait s'arrêter
là pour rendre hommage à cet ouvrage. L'intrigue policière
s'analyse ici comme un savoureux prétexte pour aborder une
problématique plus large, celle de la frontière entre le Bien et le
Mal, cette ligne fragile à laquelle nous passons notre existence à
nous accrocher tels des funambules. Les verrous en apparence
inébranlables des hauts conciles sautent un à un et les desseins
exubérants et horrifiques de quelques savants fous nous sautent au
visage.
Le lecteur haletant est incapable
d'arrêter sa lecture effrénée, captif de cette éloge à la
cruauté et criante d'humanité. Les codes sociaux et moralisateurs
instaurés comme des garde-fous se brouillent et lui font entrevoir
toute la complexité de l'âme humaine.
C'est avec une esthétique à la
Guillermo Del Toro, un suspens à la Seven, une documentation fournie
et un style presque poétique que Donato Carrisi nous invite à nous
interroger sur nos limites personnelles.
Note : 4/5